Le rayonnement, c'est la base de la thermographie
La base de la thermographie c'est les rayonnements comme la lumière, les rayons X, les micro-ondes, etc... En thermographie infrarouge, on s'intéresse aux rayonnements situés dans l'infrarouge. Notre oeil ne les voit pas. William Herschel a découvert leur existence en 1800, par leur effet calorifique sur le bulbe d'un thermomètre. Placé au delà du rouge dans le spectre du rayonnement solaire diffracté par un prisme, ce thermomètre indique encore une température (supérieure à la température ambiante) ! Le rayonnement c'est de l'énergie véhiculée dans l'espace à la vitesse de la lumière. Il est émis par la matière et dépend de sa température, d'où le nom de rayonnement thermique. Quand la matière est plus chaude (au delà de 500°C), la lumière émise est visible : notre oeil voit ces rayonnements (soleil, flamme, plaque chauffante de cuisinière électrique, braises...). Quand la matière est plus foide, il nous faut un appareil pour percevoir ces rayonnements, c'est la caméra thermique qui fonctionne dans l'infrarouge, là où se trouve l'essentiel des rayonnements émis par les corps plus froids. L'infrarouge, c'est le froid !
Mais attention ! Ne pas confondre "proche-infrarouge" et "infrarouge thermique"
Les caméras vidéo et les appareils photo ont tous la possibilité (dans le principe) de voir le rayonnement proche-infrarouge (de 0,8 à 1,1 µm), mais ils sont équipés d'un filtre empêchant de voir ces rayonnements puisqu'ils ne correspondent pas à ce que voient nos yeux. Si, en pleine nuit, on éclaire une scène avec un projecteur infrarouge (à 0,9 µm, comme dans les télécommandes de nos appareils de salon), on peut observer les rayonnements réfléchis sur la scène et voir "comme en plein jour" : voir l'image ci-dessous. Ces caméras (dites infrarouges puisqu'on les utilise dans le proche-infrarouge) ne sont pas des caméras sensibles au rayonnement des objets froids pour lesquelles il faut des caméras sensibles à plus de 2 µm. Ce ne sont donc pas des caméras thermiques, donc ce ne sont pas des caméras de thermographie. Naturellement des exceptions existent. C'est pourquoi, en thermographie, il est préférable de ne pas parler de caméra infrarouge mais de caméra thermique.
La caméra thermique
La caméra thermique est un appareil photo numérique spécial (et encore onéreux) ; il est sensible au rayonnement thermique des objets froids (dans l'infrarouge, entre 8 et 12 µm, pour les caméras usuelles). La matrice de détection est donc spécifique (l'un des principaux fabricants mondiaux est situé près de Grenoble). La caméra intégre aussi des technologies d'appareil de métrologie.
Ci contre, caméra thermique CSF IR 815 de la fin des années 1960. Passez la souris sur la photo. Caméra thermique actuelle ayant servi à réaliser de nombreuses thermographies de ce site. Documents CSF et NEC SAN-EI.
Image thermique et thermogramme
Ainsi, la thermographie infrarouge est la technique qui permet de faire une image des objets plus froids, qui émettent des rayonnements infrarouges : tout ce qui est autour de nous, les bâtiments, la nature et nous-mêmes... La caméra thermique fait des images thermiques qui sont des images des rayonnements.
Emission de rayonnement visible avec nos yeux : buse de chalumeau et flamme. Document www.imageshack.us |
Image thermique de la toiture d'un bâtiment industriel. Emission de rayonnement "froid" invisible Document Institut de la Thermographie |
Thermogramme des chats sur les toits. Emission de rayonnement "froid" invisible. Document Institut de la Thermographie |
Le rayonnement infrarouge se comporte comme le rayonnement visible, mais les propriétés des matériaux varient en fonction de la longueur d'onde du rayonnement. Documents Institut de la Thermographie - Merci à Lise |
Passez la souris sur le ballon ! |
Et comme l'énergie du rayonnement émis par la matière dépend de sa température, on devine qu'on va pouvoir mesurer cette température si l'on sait mesurer cette énergie. C'est aussi ça la thermographie : deux facettes bien distinctes, contrairement à la photographie de nos appareils-photo ou à la vidéo de nos camescopes ! En plus, elle mesure. La caméra fournit alors une image thermique avec une échelle de correspondance en température, c'est le thermogramme. On étalonne la caméra sur un objet parfait de laboratoire, le corps noir (il se comporte comme le prévoit la théorie de l'émission des rayonnements, établie en 1900 par Max Planck) et le tour est joué...
Tout n'est qu'apparence et ... réalité !
Pas tout à fait, non, le tour n'est pas encore joué ! Il faut quelques notions supplémentaires pour mesurer les températures des objets qui nous entourent. Pour le simple motif que ces objets ne sont pas parfaits, ce qui a des implications immédiates en maîtrise de la mesure... Mais il existe des situations, particulièrement dans le bâtiment, et tant mieux, où l'on n'a que faire des températures des objets : ce qui nous intéresse c'est un thermogramme en températures apparentes (les températures calculées comme si les objets observés étaient parfaits). On montre que l'image thermique est une image des déperditions par rayonnement. On passe directement de la température apparente à la déperdition ! C'est le cas général du besoin dans le bâtiment quand le thermographe respecte l'absence de soleil, ce qui est la condition de base d'un diagnostic thermographique signifiant. Bien sûr, nous simplifions l'approche.
Et quand on a besoin des températures vraies, comme c'est le cas pour le risque de condensation ? Il nous faut alors une connaissance plus fine du comportement de la matière (de combien elle n'est pas parfaite - c'est son émissivité) et de l'environnement de cette matière (quel est le rayonnement qui vient se réfléchir sur la matière en direction de la caméra - c'est la température d'environnement radiatif).
Photographie de deux fers à repasser sous tension et réglés sur coton : à gauche, à semelle aluminium brut (faible émissivité) ; à droite, à semelle revêtement céramique (forte émissivité). D'où le thermogramme des températures apparentes : 50°C et 200°C (environ) alors que les températures vraies sont similaires.
On colle une étiquette de papier sur le fer à faible émissivité, ce qui "augmente" l'émissivité à une valeur proche de celle de la céramique. Le papier, en contact étroit avec la semelle alu, "monte" à 200°C.
Documents Institut de la Thermographie.
Interprétation thermographique et interprétation thermique. D'abord l'un puis l'autre !
Eh bien, il y a de nombreux cas, dans le bâtiment, où la température apparente est proche de la température vraie. C'est le cas facile, à la portée de tous, l'interprétation thermographique ne pose pas de problème, on peut passer à l'interprétation thermique. Et les autres cas (nombreux également dans le bâtiment) : les températures (apparente et vraie) sont assez différentes : l'illusion est immédiate, l'image thermique peut être l'inverse de la réalité. L'interprétation thermographique devient une difficulté essentielle à délier ; elle interdit l'interprétation thermique tant que la réalité n'est pas comprise. Naturellement, voilà qui n'est pas imaginé une seconde par les amateurs-thermographes. La formation est donc primordiale et ne peut se suffir de quelques pages de banalités.
Et ceux qui comprennent ? Une certaine "catégorie" de ceux qui comprennent sait tirer profit de la difficulté : ils vous lanceront dans les travaux inutiles en vous démontrant tel ou tel problème, en fait inexistant. Voilà la thermographie de l'esbroufe ; la température apparente risque de vous bluffer, vous et bien d'autres ! C'est le risque du thermographe juge et partie. Voilà pourquoi les Thermographes Inscrits au Tableau sont des professionnels indépendants !
Et pourquoi ces images sont-elles en couleurs ?
L'image thermique est une représentation spatiale de l'énergie des rayonnements en provenance de la scène observée. Elle est donc une succession de valeurs entre un minimum et un maximum d'énergie sur toute l'image. Le minimum est représenté par le noir et le maximum par le blanc, ce qui nous donne une image en Noir et Blanc. Mais pour deux raisons : à la fois esthétique et besoin de meilleure discrimination spatiale des rayonnements sur l'étendue entre le noir et le blanc, on est amené à colorier les images avec une palette de correspondance entre des couleurs (arbitraires) et ces niveaux de noir et blanc ; ce sont de "fausses couleurs". Certaines applications se contentent agréablement de peu de couleurs principales (avec les dégradés entre elles), ce qui met bien en évidence un phénomène "présent" ou "absent" ("tout ou rien") comme une entrée d'air : les demi-teintes n'ont d'intérêt que pour reconnaître spatialement la scène observée. Mais les phénomènes plus divers ou les grandes surfaces (plusieurs phénomènes peuvent s'y présenter simultanément en divers endroits et à des températures différentes) impliquent de choisir une palette à plus grand nombre de couleurs. Il n'existe pas de norme pour les palettes de couleurs. On constate que la palette "tout ou rien" est beaucoup trop employée, ce qui réduit une part de la qualité ou de l'intérêt des images. (De plus, ces palettes, ayant un dégradé très progressif, permettent de masquer la faible qualité de la caractéristique de bruit de la caméra, sa résolution thermique.) Pratiquement en thermographie, on pourrait fonctionner avec 3 palettes : Noir et Blanc (qui est la palette de travail du professionnel), 2 à 5 couleurs et jusqu'à une dizaine de couleurs.
Bien noter qu'il n'existe aucune correspondance obligatoire entre les températures et les couleurs, mais il est habituel de présenter les températures élevées d'un thermogramme dans des couleurs claires ou "chaudes", et inversement pour les températures basses ( en couleurs sombres et "froides").
Exemples :
* images thermiques ou thermogrammes à faible nombre de couleurs : voir cette page ;
* images thermiques ou thermogrammes à plus grand nombre de couleurs : voir cette page.